« Montrer son corps ou montrer son livre ? » Telle est la question.
Êtes-vous présent.e sur les réseaux sociaux ? Si votre réponse à cette question est oui, vous devinez déjà de quoi va parler ce post. Pour ma part, j’ai un compte Facebook depuis onze ans, un autre sur Instagram depuis l’été dernier, encore un autre sur LinkedIn, et aussi sur Twitter. Qu’ai-je oublié ? C’est bon, je pense. J’ai fait le tour ! Et non, je ne suis ni sur Tik Tok ni sur Snap Chat, ou tout autre support formé à base d’onomatopées. Je suis trop vieille pour cela. Mais revenons-en à la question du moment, voulez-vous ?
Tout en scrollant (action consistant à faire défiler inlassablement le fil d’actualité d’un réseau avec son pouce et à perdre la notion du temps), je vois passer de plus en plus d’images sur lesquelles des auteures (mais aussi certains auteurs, si si !) se dénudent, tout en posant avec leur dernier roman. Idem chez beaucoup de chroniqueurs littéraires qui publient des shorts stories au sujet des derniers ouvrages qu’elles/ils ont lus. Du coup, je m’interroge : quel est l’objectif ? Vendre un bouquin à travers sa plastique ? Avoir plus de followers ? Quitte à passer pour une grenouille de bénitier (j’assume !), je trouve ce phénomène de plus en plus récurrent et fort regrettable. Alors, qu’on soit bien d’accord, chacun.e est libre de disposer de son corps et d’en faire ce qu’elle/ il désire. Mais honnêtement, on peut envisager qu’une damoiselle qui donne son avis sur un bouquin en mini-mini short et super décolleté arrive à collectionner les followers et les petits cœurs rouges, mais l’auteur.e, j’en doute fort.
Faisons un petit flash-back en arrière (et par la même occasion un sacré anachronisme) et imaginons notre ami Victor (Hugo pour les intimes) en vacances au Pays basque en train de poser pour un selfie avec short de bain à fleurs hawaïennes, avec Les Misérables dans les bras. (Ça y est, vous avez l’image en tête ?) Ou encore, Simone de Beauvoir en décolleté sexy lors d’une soirée mondaine parisienne et tenant dans la main Le deuxième sexe (je parle du livre !) ? Vous voyez où je veux en venir ?
Le problème, aujourd’hui, c’est certainement qu’on ne se contente plus de lire le livre. On veut connaitre l’auteur.e, sa vie, ses aspirations, ses idées politiques, religieuses, environnementales. Est-ce un bon citoyen ? Combien a-t-il d’enfant ? A-t-il trompé sa femme ? Paye-t-il sa pension alimentaire ? Un petit tour sur Google et c’est parti pour l’épluchage de sa vie privée. Vive Internet, me direz-vous. Oui, d’accord, il est plus facile aujourd’hui de communiquer avec quelqu’un dont on a lu les romans, de lui envoyer un message et de lui dire ce que l’on en a pensé. J’ai moi-même créé de nombreux liens avec d’autres auteur.e.s domicilié.e.s à des milliers de kilomètres de chez moi. L’outil m’a aussi permis d’avoir le retour de lectrices et de lecteurs qui souhaitaient me donner leur avis au sujet de Linguère Sara le voyage d’une vie ou des Endormis, et que je ne connaissais pas dans la vraie vie.
Soit. Mais, en parallèle, on a aussi gommé les frontières de l’intime, que ce soit du côté de l’auteur.e ou de celui du lecteur chroniqueur. Et je ne parle même pas de celles et ceux qui exhibent systématiquement leurs bambins sur les réseaux pour attirer plus de vues. On en revient donc à la punchline de cet article : se mettre en scène pour attirer plus de followers, et, du coup, avoir plus de probabilités de vendre quelques livres supplémentaires en montrant généreusement son corps, au détriment de la couverture de son livre.
Et là, comme disent les Ivoiriens, je réponds : « Pardon ! ».
Prochaine #punchline à suivre…
BBB, auteure qui ne se mettra pas à poil pour vendre plus de romans.
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