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BLACK MANOO – GAUZ – Roman


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Black Manoo - GAUZ

Vous souvenez-vous de ce nom : Gauz ? J’avais chroniqué l’an passé son second roman, « Camarade Papa » sur le site. Un ouvrage qui se déroule entre les Pays-Bas, la France et la Côte d’Ivoire, et qui nous embarque dans une expédition inédite le long du fleuve Comoé jusqu’à la Côte-de-l’Or. Aujourd’hui, laissez-moi vous parler de Black Manoo, que je viens de terminer.


Black Manoo, de son vrai nom Emmanuel, débarque en France, grâce à la complicité de quelques-uns, dans les années 90 avec de faux papiers.


« « REFUSÉ » dans un passeport a la même signification que la fleur de lys déposée au fer rouge sur l’épaule de l’esclave des Caraïbes au temps du code noir de Colbert : nègre fuyard ! Couper une jambe en cas de récidive ! À chaque refus de visa, il ne faut pas seulement changer de stratégie, il faut aussi changer de passeport, donc de nom. Après sept tentatives donc sept identités différentes, le Black Manoo qui obtient le visa Schengen s’appelle François-Joseph Clozel, entrepreneur en visite au salon du BTP, porte de Versailles. » (P. 18)


Son objectif : fuir un lourd passé de toxicomane qu’il laisse en Afrique, tenter sa chance ailleurs. Rapidement, il intègre la communauté africaine installée à Paris, vit dans un squat (qui s’appelle « Le Danger »), crée des liens d’amitié avec d’autres immigrés (souvent clandestins). L’entraide, la débrouille et les ennuis sont tous les jours au rendez-vous, car le pays des libertés est souvent une terre aride pour celles et ceux qui tentent en vain d’y être intégrés.


« Babou et Dominique cassent les portes de Danger le premier jour de la trêve hivernale avant la Coupe du monde de foot. Le calcul est savant. Du 31 octobre au 31 mars, les squatteurs ont sept mois et deux jours d’immunité absolue contre toute expulsion. France 98 devrait rajouter quelques mois de sursis. Il serait mal vu d’expulser des pauvres pendant les bacchanales du football mondial. Pour plus d’assurance, Babou rameute des familles noires, Dominique des hommes blancs. » (P.32)


Comme à son habitude, Gauz souffle le chaud et le froid dans un même paragraphe. Ça claque et ça balance, du lourd : tout le monde en prend pour son grade. Profiteurs et profités, abuseurs et abusés d’un système ciselé de failles en tout genre. Utopie, absurdité, déni. On y croirait presque tant cette fable moderne est captivante. Du pur style Gauz – modèle déposé, inimitable. À la fois drôle et révoltant. Les pages défilent de manière vertigineuse, nous entraînant dans ce qui ressemble au départ à une valse de papier… pour se terminer en lame de fond.


Et cette phrase qui revient, comme une ritournelle : « La rumeur est con. » D’un claquement de doigts, on passe du tragique au comique. Un humour souvent cinglant, en mode coupé-décalé à l’ivoirienne, et des vérités jetées au visage du lecteur dans chaque chapitre. Des gouttes de sang perlées qui viennent éclabousser le public autour d’un match de boxe. Le tournoi de la survie.


Bravo à l’auteur et belle future lecture à vous.


160 pages / Nouvelle édition sortie en janvier 2022 chez Points.


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