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LA PETITE BOUTIQUE AUX POISONS - Sarah PENNER


la petite boutique aux poisons Sarah penner the last apothecary
La petite boutique aux poisons - Sarah PENNER - roman

Trois destinées féminines, deux époques distinctes en simultané, une ville. Voici le décor du premier roman de Sarah Penner, une auteure américaine qui, début 2021, décide de quitter son travail alimentaire pour écrire à plein temps.

Sorti en mars 2021 en version originale, The Lost apothecary est un succès immédiat, qualifié de best seller par le New York Times. Depuis le début de cette année, il est disponible en version française.

Mais revenons-en à nos poisons...


L'ouvrage débute sur un ancien serment d'apothicaire :

"Je jure solennellement devant Dieu, créateur de toute chose... de ne jamais révéler les mystères du métier à des ingrats ou à des inconscients, de ne jamais divulguer les secrets qui me sont confiés... De ne jamais administrer de poison... De désavouer et de fuir comme la peste les pratiques scandaleuses et pernicieuses des charlatans, de la secte empirique, et des alchimistes... Et de ne jamais conserver de remèdes rances ou nuisibles dans mon officine. Que la bénédiction divine perdure, tant que je suivrai ces ordres !"


4 février 1791. A la mort subite de sa mère, Nella a hérité de son officine, nichée au coeur de Londres. Depuis son ouverture, la petite boutique, constituée d'une seule pièce, a toujours eu pour vocation de venir en aide aux femmes qui s'y présentaient, par le bouche à oreille. Elles venaient y chercher des remèdes naturels, minéraux, végétaux ou animaux. Elles y trouvaient aussi du réconfort. Mais à la disparition de sa mère, Nella plonge dans la dépression. Elle n'a pas d'autre famille. Quelques temps après, elle tombe amoureuse de Frederick, un beau jeune-homme qui se présente à la boutique, dans l'espoir de trouver un remède pour sa soeur, malade. Rapidement, Nella tombe sous le charme de Frederick... jusqu'à ce qu'il la trahisse. A partir de là, l'apothicaire divise le magasin en deux parties distinctes : la première devient une façade à l'abandon, la seconde, la pièce cachée et secrète, son atelier de fabrication aux remèdes mais aussi aux poisons. Seules les habituées et les connaisseuses, toutes des femmes, savent encore comment entrer en contact avec Nella, mais surtout, comment faire appel à ses services d'empoisonneuse.


"Comme il était facile de les duper ! Tous autant qu'ils étaient. Seules restaient les femmes à qui une amie, une soeur ou une mère, avait recommandé l'adresse. Elles seules savaient que le tonneau d'orge perlé servait une fonction cruciale : c'était un moyen de communication, une cachette pour des lettres dont le contenu ne pouvait être révélé à haute voix. Elles seules savaient que les étagères camouflaient une porte invisible menant à mon officine. Elles seules savaient que je les attendais en silence derrière le mur, les doigts tâchés de résidus de poison." page 24


Un matin, à l'aube, une petite jeune-fille se présente. Elle vient chercher une commande pour sa maîtresse, Mrs Amwell. Eliza Fanning a douze ans. Cependant, elle semble tout à fait à l'aise avec la situation, et avec Nella. Quelques temps plus tard, elle ressort du magasin avec deux oeufs crus empoisonnés, le prochain petit-déjeuner du maître de maison.


Aujourd'hui, lundi. Caroline est une américaine d'une trentaine d'années. Elle vient d'arriver à Londres. C'est la première fois qu'elle découvre l'Europe. Ce voyage, elle n'aurait pas dû le faire seule, mais avec son mari avec qui elle partage sa vie depuis dix ans. Mais l'anniversaire de mariage ne s'est pas déroulé comme prévu... et finalement, Caroline est partie seule fêter ses noces d'étain. Alors, Caroline est perdue, elle se sent seule et trahie par son époux infidèle. Au vue de ses dernières découvertes, elle ne sait plus où elle en est. Elle déambule dans les rues londoniennes et y rencontre un groupe de personnes à l'activité quelque peu atypique : accompagnés de Alf, leur guide, ils fouillent la vase de la Tamise et en extraient les objets abandonnées à l'usure du temps.


"La Tamise traverse Londres et remonte très loin. En cherchant bien, on peut y retrouver de petits vestiges de l'Histoire, datant parfois de l'Antiquité romaine. Il fut un temps où les fouilleurs, qu'on appelle les mudlarks, récoltaient des pièces, des bijoux, des céramiques, pour ensuite les vendre. C'est de çà que parlent les romans de l'époque victorienne. Les gamins des rues récupéraient ce qu'ils pouvaient pour essayer d'acheter un bout de pain. Mais aujourd'hui, nous ne sommes là que pour le plaisir. Vous pouvez conserver ce que vous voulez, c'est la règle." page 37


Pas très convaincue par tout ce cirque, elle se laisse finalement tenter et commence à fouiller, elle aussi. Rapidement, elle découvre une petite fiole en verre soufflé, mesurant une dizaine de centimètres, et avec, sur le côté, la gravure sommaire d'un animal : à priori la représentation d'un ours. Caroline décide alors de mener son enquête et de découvrir l'histoire de cette fiole.


J'ai passé un moment agréable avec cette lecture mais j'avoue avoir peu accroché avec le personnage de Caroline. J'ai largement préféré explorer les parcours de Nella et d'Eliza au XVIIIème siècle. Mais c'est certainement dû au fait que j'aime les romans historiques. En parallèle, l'auteure fournit quelques références relatives à l'herboristerie qui sont intéressantes et accessibles aux néophytes. A la fin de l'ouvrage, vous trouverez même quelques "annotations et remèdes comme déchiffrés des carnets de Bear Alley. L'auteure y rajoute également une note historique concernant les cas d'empoisonnement non élucidés : "Il fallut attendre la moitié du XIXème siècle pour que les premiers toxicologues soient en mesure de détecter le poison dans les tissus humains. (...) D'après les données disponibles sur la période de 1750-1914, les poisons les plus fréquemment cités dans les affaires criminelles sont l'arsenic, l'opium et la strychnine (nux vomica). (...) Certains poisons, la mort-aux-rats, par exemple, étaient à portée de main. D'autres ne l'étaient pas, et leur provenance - les boutiques où on pourrait les avoir achetés - n'a jamais été identifiée."

Il n'est pas question ici de diaboliser la femme apothicaire dessinée sous les traits de Nella, mais plus de faire prendre conscience aux lecteurs des dures conditions de vie des femmes à cette époque, et ce, quel que soit leur statut social. Pour certaines d'entre elles, la seule solution semblait être celle du poison.


339 pages / publié en version française en janvier 2023, aux Editions Faubourg Marigny



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