Laurence Peyrin est une journaliste et auteure contemporaine. Après l’océan est son dernier roman, publié ce mois-ci aux Éditions de l’Épée.
Dans cet ouvrage historique, elle nous raconte le voyage tragique de la famille britannique Alistair qui, en 1912, quitte Portsmouth pour rejoindre New York à bord du Titanic. Pâtissier de génération en génération, c’est suite à une rencontre avec un jeune fortuné américain de passage en Angleterre que Charles Alistair (le père de famille) décide d’embarquer sa femme, ses deux filles (Molly et Letta) et son beau-fils (le mari de Letta) pour une nouvelle vie, de l’autre côté de l’Atlantique.
« Vous ferez fortune avec vos tourtes, à New York, lui avait assuré Newton III en débarrassant les dernières miettes de sa barbichette d’un revers de main. Si vous voulez traverser l’Atlantique et vous établir, prévenez-moi, j’investirai. » (P.9)
Mais vous connaissez déjà cette histoire : le Titanic coule !
Seules rescapées de la famille Alistair : Letta, la sœur ainée, et Molly, la cadette qui atteignent New York le 18 avril 1912.
« — Molly, réveille-toi. Nous arrivons, mon P’tit Chou. Arriver ? Quelle affreuse ironie. Il aurait fallu inventer un autre verbe pour signifier ce débarquement sans but, sans foyer, sans plus rien. » (P.14)
Secourues par l’Armée du Salut et logées dans un hôtel, Letta et Molly tentent alors de survivre en attendant de repartir pour l’Angleterre. Mais l’adolescente est en état de choc. Elle ne parle plus et, lorsqu’elle comprend qu’elle va devoir de nouveau embarquer sur un bateau, elle est prise d’une crise de panique. Le bateau part sans elles. Letta n’a alors d’autre choix que de trouver du travail pour subvenir à leurs besoins. Avec l’aide de leur logeuse, elle est embauchée à la pharmacie-apothicaire C.O Bigelow, la plus ancienne pharmacie de New York, fondée en 1838. Entre-temps, dans un élan de désespoir, Molly essaye de se défenestrer. Elle est alors internée sur l’île Blackwell (rebaptisée « Roosevelt Island » en 1973 par Roosevelt), au Metropolitan Hospital. Molly n’a plus qu’une seule idée en tête : sortir sa sœur de cet enfer.
Sous bien des aspects, ce roman historique est généreusement documenté. L’auteur a su écrire sur un sujet largement exploité qui n’est autre que le drame du Titanic. 1491 morts : 76% chez les membres d’équipage, 38% des passagers en première classe, 59% des passagers en seconde classe, 76% des passagers en troisième classe. 710 survivants !
Laurence Peyrin, à travers le personnage de Molly, s’intéresse également au trouble de stress post-traumatique (TSPT) qui ne sera reconnu officiellement qu’en 1980 par l’OMS et l’APA (association de psychiatrie américaine). Elle réintroduit dans l’histoire le nom de Nellie Bly, la première journaliste d’investigation, qui s’était fait passer pour folle pour enquêter durant 10 jours sur l’île Blackwell. J’ai eu par moment l’impression de replonger dans Le bal des Folles de Victoria Mas, et le service psychiatrique de Charcot à la Salpêtrière.
Enfin, elle nous fait réfléchir à la fois sur la condition féminine aux États-Unis au début du XXe siècle, et sur l’enfer auquel ont dû faire face celles et ceux qui avaient survécu au naufrage, mais aussi tout perdu au fond de l’océan.
Si vous aimez les romans historiques, vous y trouverez largement votre compte en lisant cet ouvrage.
347 pages / Publié en avril 2022 aux Éditions de l’Épée
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